Page:Ramayana trad Hippolyte Fauche vol1.djvu/102

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chose aimée des citoyens veut donc faire le puissant monarque ? Pour quelle raison, au comble d’un enchantement suprême, la mère de Râma verse-t-elle aujourd’hui ses trésors comme une pluie de largesses ? »

Interrogée ainsi par cette femme bossue, la nourrice, toute ravie de plaisir, commence à lui raconter ce qui en était du sacre attendu pour l’association à la couronne : « Demain, au moment où la lune se met en conjonction avec l’astérisme Poushya, le roi fait sacrer comme héritier du trône son fils Râma, cette mine opulente de vertus. C’est pour cela que tout ce peuple est en joie dans l’attente du sacre, que les habitants ont décoré la ville et que tu vois la mère de Râma si heureuse. »

À peine eut-elle ouï ce langage désagréable pour elle, soudain, transportée de colère, la femme bossue descendit précipitamment de cette plate-forme du palais. La Mantharâ, qui avait conçu une mauvaise pensée, vint donc, les yeux enflammés de fureur, tenir ce langage à Kêkéyî, qui n’était pas encore levée : « Femme aveugle, sors du lit ! Quoi ! tu dors ! Un affreux danger fond sur toi ! Malheureuse, ne comprends-tu pas que tu es entraînée dans un abîme ! »

Kêkéyî, aux oreilles de qui cette bossue à l’intention méchante avait jeté dans sa fureur ces mots si amers, lui fit à son tour cette demande : « Pourquoi es-tu si en colère, Mantharâ ? Apprends-moi quelle est cette chose que tu ne peux supporter : en effet, je te vois toute pleine de tristesse et le visage bouleversé. »

À ces paroles de Kêkéyî, la Mantharâ, qui savait ourdir un discours artificieux, lui répondit ainsi, les yeux rouges de colère et d’envie, pour augmenter le trouble de sa maîtresse et la séparer enfin de Râma, dont cette