roi ; l’honneur qui m’est dû ne m’a pas été refusé ; mais, quel que soit mon désir, daigne faire en ce jour une chose qui m’est chère. Donne-m’en l’assurance maintenant, si tu veux bien la faire ; et quand j’aurai, moi, reçu ta promesse, je t’expliquerai ce qu’est mon désir. »
À ces paroles de cette femme chérie, le monarque, tombé sous l’empire de son épouse, entra dans ce piège à sa ruine, comme une antilope s’engage étourdiment au milieu d’un filet. Le prince, qui voyait toute consumée de sa douleur cette Kêkéyî, épouse bien-aimée, elle qui jamais ne manqua au vœu conjugal, elle si attentive à tout ce qui pouvait lui être utile ou agréable : « Femme charmante, dit-il, tu ne sais donc pas ! Excepté Râma seul, il n’existe pas dans tous les mondes une seconde créature que j’aime plus que toi !
« Je m’arracherais ce cœur même pour te le donner : ainsi, ma Kêkéyî, regarde-moi et dis ce que tu désires.
« Tu vois que je possède en moi la puissance, ne veuille donc plus balancer : je ferai ta joie ; oui, je le jure par toutes mes bonnes œuvres ! » Alors, satisfaite de ce langage, Kêkéyî joyeuse révéla son dessein très odieux et d’une profonde scélératesse.
« Que les Dieux réunis sous leur chef Indra même entendent ce serment solennel de ta bouche, que tu me donneras la grâce demandée ! Que la lune et le soleil, que les autres planètes mêmes, l’Éther, le jour et la nuit, les plages du ciel, le monde et la terre ; que les Gandharvas et les Rakshasas, les Démons nocturnes, qui abhorrent les clartés du jour, et les Dieux domestiques, à qui plait d’habiter nos maisons ; que les êtres animés, d’une autre espèce et de quelque nature qu’ils soient, connaissent la parole échappée de tes lèvres !