Page:Ramayana trad Hippolyte Fauche vol1.djvu/164

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Râma, vêtu de ses habits tissus d’écorce, récita la prière usitée au coucher du soleil et prit seulement un peu d’eau, que Lakshmana lui apporta de soi-même. Puis, quand celui-ci eut lavé les pieds du noble ermite, couché sur la terre avec son épouse, il vint à la souche de l’arbre et s’y tint debout à côté d’eux.

La nuit alors, bien qu’il fût ainsi couché sur la dure, coula doucement pour cet illustre, ce sage, ce magnanime fils du roi Daçaratha, qui n’avait pas encore senti la misère et n’avait goûté de la vie que ses plaisirs.

Gouha adressa, consumé par la douleur, ces mots à Lakshmana, qui veillait, sans fermer l’œil un instant, sur le sommeil de son frère : «  Ami, c’est pour toi que fut préparé ce lit commode ; délasse bien cette nuit, fils de roi, délasse bien tes membres dans cette couche !

« Tous ces gens sont accoutumés aux fatigues, mais toi, as-tu goûté de la vie autre chose que ses douceurs ! Laisse-moi veiller cette nuit à la garde du généreux Kakoutsthide. Certes ! il n’y a pas d’homme sur la terre, qui me soit plus cher que Râma : fie-toi donc à cela en toute assurance ; je le jure à toi, héros, je le jure par la vérité ! »

« Gardés ici par toi, monarque sans péché, nous sommes tous sans crainte, lui répondit Lakshmana : ce n’est pas tant le corps que la pensée qui veille ici et dans sa tristesse, ne peut céder au sommeil. Comment le sommeil, ou les plaisirs, ou même la vie me seraient-ils possibles, quand ce grand Daçarathide est ainsi couché par terre avec Sîtâ ?

« Vois, Gouha, vois, couché dans l’herbe avec son épouse, celui devant lequel ne pourraient tenir dans une bataille tous les Dieux, ligués même avec les Asouras ;