lui, héros, qui fera passer le fleuve du Gange à cette armée. »
À ces mots, Çatroughna, obéissant à l’ordre que lui donnait Bharata, dit à l’un de ses gens : « Fais amener ici Gouha ! » Le magnanime parlait encore, que Gouha vint, joignit ses mains en coupe et s’exprima dans les termes suivants : « As-tu bien passé la nuit sur la rive du Gange, noble enfant de Kakoutstha ? Es-tu, ainsi que ton armée, dans un état parfait de santé ? Mais cette demande est moins l’expression de mon espérance que celle de mon désir : en effet, d’où pourrait venir le repos à ta couche, quand, tourmenté par ta pieuse tendresse, l’exil de ton frère et la mort du roi ton père assiègent continuellement ta pensée ; car les peines de l’esprit et du corps ne chassent point l’amour. »
À la suite de ces mots, l’inconsolable fils de Kêkéyî répondit à Gouha, d’un air bien affligé, le cœur touché néanmoins de son affectueux désir : « Roi, tu nous combles d’honneur, mais notre nuit n’a pas été bonne !… Cependant, que tes serviteurs nous fassent traverser le Gange sur de nombreux vaisseaux. »
À peine eut-il entendu cet ordre de son jeune suzerain, Gouha courut en toute hâte vers sa ville, et là : « Réveillez-vous, mes chers parents ! Levez-vous ! Que sur vous descende la félicité ! Mettez à flot des navires ! Je vais passer l’armée à l’autre bord du Gange. » À ces mots, tous se lèvent avec empressement, et, sur l’ordre même du monarque, ils vont de tous les côtés rassembler cinq cents navires.
Ensuite, Gouha fit amener un esquif magnifique, couvert d’un tendelet jaune-pâlissant et sur lequel, résonnant de joyeux concerts, flottait un drapeau marqué du bienheu-