Page:Ramayana trad Hippolyte Fauche vol2.djvu/183

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

pieds de Sîtâ une tête si chère à sa vue, disparut au même instant, et Râvana, jetant lui-même devant elle un grand arc tout resplendissant : « Voilà, dit-il, ce qu’on appelle dans les trois mondes l’arc de Râma ! Cette arme, à laquelle tient sa corde, c’est Prahasta qui me l’apporta ici lui-même, après qu’il en eut tué le maître dans cette nuit de combat. »

Quand Râvana vit Sîtâ, qui, fidèle à sa foi conjugale et déchirée par le malheur de son époux, versait des larmes : « Qu’as-tu, lui dit-il, à voir ici davantage ? Allons ! deviens mon épouse, noble dame ! »

À peine Sîtâ eut-elle vu cet arc gigantesque et la tête ravissante ; à peine eut-elle vu, et les cheveux, et cette place de la tête, où leur extrémité se rattachait en gerbe, et le joyau étincelant de l’aigrette, que, tombée dans une profonde douleur et convaincue par tous ces traits exposés devant ses yeux, elle se mit à maudire Kêkéyî et à pousser des cris comme un aigle de mer.

« Jouis, au comble de tes vœux, Kêkéyî ! ce héros qui répandait la joie dans sa famille est tué, et toute sa race est détruite avec lui par une ambitieuse, amie de la discorde ! »

La chaste Vidéhaine eut à peine articulé ces mots, que, tremblante et déchirée par sa douleur, elle tomba sur la terre, comme un bananier tranché dans un bois. Dès que la respiration lui fut rendue et qu’elle eut recouvré sa connaissance, elle baisa cette pâle tête et gémit cette plainte avec des yeux troublés :

« Je meurs avec toi, héros aux longs bras ! c’est là ce que demande la foi que j’ai vouée à mon époux. Ce dernier état de l’homme est donc maintenant le tien, et mon veuvage m’arrache également la vie. Le premier et le plus