Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/500

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ques[1]. Il est impossible de méconnaître ici les vues remarquablement profondes de Doubleday, qui dans le renouvellement incessant des aristocraties et des fortunes reconnaît et admire une loi providentielle due à l’éternelle sagesse du Créateur[2].

Que l’effet naturel de la richesse et du bien-être soit de diminuer la natalité — et cela, par conséquent, indépendamment de toute volonté — voilà une thèse qui, complètement insoupçonnée de Malthus, a recueilli après lui des adhérents de plus en plus nombreux. Mais, parmi les causes étrangères à la volonté, quelle serait cette cause purement physiologique qui produirait ce résultat ? Est-il vrai que ce soit, comme le voulait Doubleday, un effet de la déplétion et de la réplétion ?

Pas tout à fait, répond-on d’ordinaire, et c’est ici qu’intervient la théorie de Spencer, beaucoup plus répandue maintenant que les autres et devenue pour ainsi dire dominante.

Suivant nombre d’auteurs, en effet, l’activité génésique est en raison inverse de l’activité cérébrale, d’où il suit

  1. Op. cit., ch. x ; — pp. 8, 242 et s. ; — pp. 250 et s.
  2. « On se demandait toujours, dit-il, pourquoi une si large part des biens de la terre serait donnée à une classe et refusée aux classes qui sont en dessous d’elle. Ce phénomène semblait un injuste monopole. Il y avait donc, dans la supposition commune, une classe peu nombreuse qui, à moins que des violences extraordinaires et redoutables ne vinssent changer l’ordre de succession et dépouiller l’héritier, faisait passer d’immenses possessions à ses descendants. Il est difficile d’échapper à cette objection, si l’on a une fois admis l’opinion commune sur le progrès de la population. L’objection s’évanouit, au contraire, avec notre théorie… Alors, en effet, en regardant la société et ses progrès, on voit que toute croissance est par en bas et tout déclin par en haut. Les détenteurs de la richesse ne peuvent pas longtemps maintenir une postérité à qui la transmettre. Les vieilles familles, comme l’a si bien dit Thomas Brawne, ne durent pas trois chênes. Ainsi, dans une incessante évolution, les descendants des pauvres héritent continuellement des biens des riches… Bien qu’il y ait une inégalité individuelle, au moins n’y en a-t-il pas d’autres. À la longue, la descendance des pauvres est investie des biens accumulés par les riches ; et elle, à son tour, manquant plus tard d’héritiers, les cédera aux enfants de ceux qui ne sont pas encore riches. Distribution empreinte d’une admirable équité, qui, au milieu des inégalités que nous apercevons, est bien faite pour inspirer l’admiration profonde de tous les esprits réfléchis ! (Op. cit., pp. 258-259).