Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/723

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livre, paru en 1824, Thompson pose très nettement les trois principes — apparemment très orthodoxes — de la liberté du travail, de la propriété des produits garantie aux producteurs et de la liberté des échanges[1]. Mais notre régime actuel de propriété empêche l’application de ces principes ; en effet, bien que la valeur ait tout entière pour cause le travail, ainsi que le voulait Ricardo, la loi autorise cependant les propriétaires de bâtiments et de machines à percevoir une rente et des profits, qu’ils prélèvent sur le travail même des ouvriers. Les capitalistes et les propriétaires s’adjugent ce prélèvement comme s’il était une plus-value — surplus value, additional value, dit Thompson — que le capital ou la terre, et non pas le travail, aurait produite. La part des capitalistes et propriétaires ne devrait pas excéder l’usure des terres bâtiments et machines[2]. Quant au remède, il est dans la vulgarisation des communautés coopératives d’Owen. « C’est dans les travaux de Thompson, dit Antoine Menger, que les socialistes postérieurs, les saint-simoniens, Proudhon, mais surtout Marx et Rodbertus ont puisé directement ou indirectement leurs doctrines[3]. »

Les emprunts faits au saint-simonisme et à Sismondi ont été plus remarqués. Nous signalons les suivants : 1° pour Rodbertus, la théorie des crises, reproduite de Sismondi, quoique Rodbertus les attribue à la sous-consommation, tandis que Sismondi en accusait la surproduction[4] ;

    to labour the whole product of its exertions (1827), etc. — Voyez A. Menger, op. cit., pp. 72 et s. — Thompson est longuement étudié dans Denis, Histoire des systèmes économiques et socialistes, t. II, pp. 483-541.

  1. « Natural laws of distribution : 1° ail labour ought to be free and voluntary, as to its direction and continuance ; 2° all the products of labour oughs to be secured to the producers of them ; 3° all exchanges of these product, ought to be free and voluntary » (Thompson, op. cit.).
  2. On retrouve la même thèse chez des démocrates chrétiens. Voyez les Aphorismes de politique sociale, 1891, pp. 42-43 (cités dans nos Éléments d’économie politique, 2e édition, p. 467 en note).
  3. A. Menger, Droit au produit intégral, tr. fr., pp. 72 et s.
  4. Voyez supra, pp.349 et s. — Aftalion, Œuvre économique de Sismondi pp. 99 et s. et particulièrement p. 108 ; item, pp. 254 et s.