Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/249

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Bacalan sur le commerce extérieur : 1° le commerce international ne peut être qu’un échange, et la monnaie ne peut y jouer que le rôle de marchandise, à moins qu’on ne la prenne seulement pour un signe : donc tout tarif qui aura pour but de faire exporter plus qu’on n’importera, poursuivra une chimère ; car l’équilibre s’impose et il ne peut y avoir que des différences de composition, mais non des inégalités de totaux, entre les deux courants d’entrée et de sortie ; si un pays recevait un excédent de monnaie, celle-ci perdrait de sa valeur jusqu’à ce que l’équilibre rompu des forces économiques fût parvenu à se rétablir ; 3° on ne peut étendre son commerce qu’en faisant ou laissant se développer le commerce ; des autres nations : autrement dit, c’est la loi de solidarité des intérêts économiques entre nations ; enfin, 4° il n’y a pas même besoin de réciprocité dans le libre-échange, et cela pour l’intérêt combiné de l’agriculture, des consommateurs et du fisc. Cette dernière opinion sera exprimée également par Turgot[1].

Graslin était un adversaire : Condillac est tout au plus un indépendant ou un disciple émancipé[2]. Cependant le Commerce et le gouvernement, paru en 1776, ne saurait être compris parmi les œuvres de l’école physiocratique. De même que les physiocrates, Condillac admet bien que « la terre est l’unique source des richesses » ; mais il croit aussi à l’utilité et à la productivité du commerce, ne fût-ce que par cette raison — absolument insuffisante — que tout acheteur donne moins pour avoir plus (sans quoi il n’achèterait pas), ce qui implique bien, lui semble-t-il, que le commerçant vendeur a produit, comme richesse

  1. Voyez Sauvaire-Jourdan, op. cit., pp. 10-11. — Bacalan, selon lui, s’est inspiré de Hume, Essai sur la balance du commerce et Essai sur la jalousie commerciale (Op. cit., p. 33).
  2. Bonnot de Condillac, né à Grenoble en 1714, mort en 1780, auteur de la théorie des sensations considérées comme source unique des idées et de l’entendement, et beaucoup plus connu comme philosophe que comme économiste. — Voyez Denis, Histoire des systèmes économiques et socialistes, t. 1, pp. 153-164.