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cités, qui, s’ils étaient les adversaires de List, étaient aussi les adversaires du morcellement douanier de l’Allemagne, non moins que des corporations obligatoires et de tout l’ancien régime maintenu pour les paysans[1].

Le livre de List, avec sa vivacité de discussion et parfois son allure de pamphlet, souleva des orages dans le monde scientifique allemand[2].

Quant à l’école protectionniste, elle eut d’autres maîtres que Raymond sur la terre d’Amérique où elle était née. Nous retrouverons plus tard Carey, qui nous intéresse à d’autres points de vue. Mais ici, pour ne plus y revenir, nous citerons John Rae et Simon Patten.

John Rae, Écossais émigré au Canada, est l’auteur d’un ouvrage spécialement dirigé contre Adam Smith et son système de liberté du commerce, non sans un parti pris et des exagérations qui en diminuent singulièrement la valeur scientifique[3]. Lui aussi — et il y consacre la première partie de son ouvrage — professe et veut démontrer que l’intérêt individuel et l’intérêt national ne sont pas identiques.

Patten, professeur à l’Université de Philadelphie, très scientifique et très froid, ne diffère pas moins de List par son allure que par l’ensemble de son système[4]. Il remplace d’abord le principe de l’éducation industrielle à vitesses inégales par le principe de la distinction des sociétés « à

  1. Voyez plus haut, pp. 338-340.
  2. À citer entre autres, à cause de la situation et de l’autorité de son auteur, l’opuscule de Rau, Zur Kritik ueber Fr. List’s nationales System der politischen Œkonomie, Heidelberg, 1843.
  3. Statement of some new principles on the subject of political economy, exposing the fallacies of the system of free trade and of some other doctrines maintained in the Wealth of nations, Boston, 1834. — Il ne faut pas confondre ce John Rae avec l’économiste anglais contemporain John Rae, auteur de Eight hours of labour, 1897 (tr. fr., 1900). Ce dernier cherche à y démontrer que la réduction de la journée ouvrière à huit heures augmenterait beaucoup la productivité industrielle et qu’à ce titre son seul tort serait d’accroître l’armée des sans-travail (Op. cit., p. 207).
  4. Fondements économiques de la production, 1890, traduits par M. Lepelletier, avec préface de M. Cauwès, 1899.