Page:Rambaud, Histoire des doctrines économiques, 1909.djvu/459

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tière. Ses Principes de science sociale s’en inspirent d’une manière constante. Il mérite surtout des éloges pour son sens chrétien de la loi du progrès et pour sa foi à la Providence et à la Sagesse du Créateur. À ce titre, il a élevé une noble protestation contre Ricardo, Malthus et Stuart Mill, dont le pessimisme pouvait trop facilement inviter au blasphème.

Carey devrait-il être rangé parmi les maîtres de l’école historique ? On l’a dit[1] ; et l’influence que le milieu américain où il vivait a exercée sur lui, le soin qu’il met à montrer que les déductions de la méthode métaphysique de Ricardo sont démenties par l’histoire, tout cela paraît encourager à en faire un partisan de l’historisme. À tout prendre cependant, ce serait une erreur, lorsque lui-même affirme avec une foi si profonde la constance d’un certain ordre dans le monde et l’empire de lois régulières qui n’ont jamais accepté de violations, ni de démentis.

Carey eut un disciple en Peshine Smith, auteur d’un Manuel d’économie politique (1853) ; mais ce dernier n’exagère-t-il pas, lorsqu’il affirme l’existence d’une économie politique fondée sur la base des lois purement physiques et possédant la certitude absolue qui appartient aux sciences positives[2] » ?

  1. Sherwood, Tendencies in American economic thought, p. 22 : « En réalité, dit Sherwood, Carey appartient à l’école historique. En dépit de quelques fantaisies qui lui ont valu des blâmes exagérés, il mérite plus d’éloges que beaucoup des adhérents purement négatifs de cette école, parce qu’il a fait un effort énergique pour construire une philosophie positive du progrès économique et social. »
  2. Peshine Smith (1814-1882) remplit diverses fonctions publiques aux États-Unis ; puis il fut au nombre des législateurs étrangers que le Japon avait fait venir pour se donner des lois. Il habita ce pays de 1871 à 1876.