Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/135

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marbre de Michel-Ange retravaillé par le ciseau timide de quelque disciple inquiet de la gloire du maître.

Le dix-septième siècle avait embelli Pascal, il était réservé au dix-huitième de le travestir. Il se fit un Pascal à son usage ; il laissa dans l’ombre quelques-uns des plus beaux morceaux dans lesquels le chrétien se montrait avec trop d’avantage ; il fut soigneux de tous ceux dont pouvait profiter la philosophie, soit en les approuvant, soit en les livrant au ridicule ; puis il inventa l’histoire de l’abîme, faisant ainsi de Pascal un grand homme et un grand visionnaire. En lui décernant une place au Panthéon, il lui en retint une autre à l’hôpital des fous.

Avec l’esprit d’investigation dont il a donné tant de preuves, le dix-neuvième siècle entreprit la recherche du véritable Pascal. Il le débarrassa de tout ce que lui avait prêté l’esprit des autres, et lui rendit tout ce qu’on lui avait ôté. Mais Pascal ne parut pas d’abord beaucoup gagner à redevenir lui-même. À peine le critique dont l’esprit toujours pénétrant et toujours actif a, dans des temps divers, révélé à la France Platon, Hegel et Mme de Longueville, était-il remonté aux sources, qu’il découvrit en Pascal, sous les dehors de l’apologète fervent, un sceptique des plus dangereux. M. Cousin ne prit point la chose en plaisanterie. Il est éclectique, et l’éclectisme est