Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/192

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les questions ? Qui osera démentir Pascal ? Qu’il se nomme le mortel fortuné qui n’a plus rien à attendre des plaisirs et plus rien à craindre de l’ennui ? C’est à lui qu’il appartient de jeter la première pierre à Pascal.

Mais la justice ! voilà, dira-t-on, le côté faible du tableau, voilà le point qui n’est plus ressemblant. Que dans l’enfance des nations l’idée de justice ait été étrangement défigurée, cela est incontestable ; mais de nos jours, n’a-t-elle pas pour elle toute la puissance de l’esprit public ? La jurisprudence a eu ses époques ; mais le temps vient où, par une épuration continue, elle atteindra le plus haut degré de perfection possible, et dès lors elle ne changera plus, du moins dans ses principes essentiels. Il est vrai encore qu’elle a longtemps varié d’une province à l’autre ; mais ne voyez-vous pas que toutes les barrières s’abaissent. Encore quelques vies d’homme, et, pour la justice, il n’y aura plus de Pyrénées ; encore quelques vies d’homme, et la force écoutera la voix de la justice, comme autrefois le jeune Samuel écoutait la voix de son Dieu. — Je souhaite de tout mon cœur que ces espérances se réalisent ; mais peut-être ne ferions-nous pas mal d’attendre encore quelque temps, avant d’effacer comme vieilli tout ce que dit Pascal de cet étrange traité entre la force et le droit. La force n’a pas encore partout la docilité de l’agneau. Quand parle la justice, elle n’a pas