Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/223

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

est condamnée à l’immobilité. La logique hégélienne procède bien autrement. Elle reconnaît dans la pensée et par suite dans la nature, ce que Platon avait déjà entrevu, l’existence nécessaire de termes opposés. La pensée, comme le monde, a ses pôles. Hegel les affirme l’un et l’autre, et travaille à les réunir dans un principe supérieur dont, par leur diversité même, ils manifestent toute la richesse. Appliquant à l’homme et à l’humanité le procédé de cette logique remarquable, Hegel en reconnaît avec Pascal et la grandeur et la misère. Il explique la grandeur de l’homme par ce qu’il a d’être en lui, et sa misère par le peu qu’il a d’être : ce sont, chose curieuse, les expressions mêmes de l’apologète chrétien qui s’appliquent à merveille au système du penseur allemand. Jusqu’ici ils sont d’accord ; à partir de ce point, ils s’éloignent. Pascal cherche, la conciliation des termes opposés de grandeur et de misère, d’être et de néant dans l’hypothèse d’une déchéance ; Hegel dans l’idée du devenir, qui tient compte aussi de l’être et du non être, ou, si l’on veut, de la grandeur et de la petitesse de l’homme. L’un place l’idéal à l’origine de toutes choses et veut que nous en soyons dépossédés ; l’autre le laisse entrevoir dans les profondeurs de l’avenir et veut que nous y tendions.

Voilà deux hypothèses ou deux lois en présence, le dogme philosophique du devenir et le dogme chrétien