Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/300

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de se peindre lui-même. » Voilà le mot : « les conditions du genre ». Malgré Lisette et le Chambertin, il est telle chanson de Béranger où règne une rhétorique qui, pour différer de celle de Jean-Baptiste Rousseau, n’en est pas moins de la rhétorique.

M. Renan ne paraît pas goûter beaucoup plus quelques-unes des grandes chansons de Béranger, n s’élève contre sa manie de transformer tout en déclamation. Il y a longtemps qu’à l’étranger on a été frappé de la part qui revient à la déclamation dans l’œuvre de Béranger. Un Allemand, homme de goût et d’un jugement pénétrant, me le disait à sa manière, il y a tantôt quinze ans : « Je ne comprends rien à ce poète ; quand il n’est pas polisson, il est académique. » Encore un jugement qui pèche par excès, mais qui a sa part de vérité. Béranger a inventé la chanson académique, et ce ne sera pas son meilleur titre de gloire. La Sainte alliance des peuples est-elle bien de la poésie ? Certes, elle n’en manque pas. Il y en a partout, de la poésie, même dans la prose. C’est une question de plus ou de moins. Mais quand on écrit en vers, on a tort de s’en tenir au moins. Or une métaphore commune, brillamment paraphrasée, court le risque de n’être qu’un minimum. Déranger dit qu’il a vu la Paix,

Semant de l’or, des fleurs et des épis :

heureuse vision, qu’un mot épuise. Il affirme de plus