Page:Rambert - Études littéraires, t1, 1890.djvu/53

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Servet put dès ce moment entrevoir le sort qui le menaçait ; mais de graves événements vinrent tout à coup lui rendre la franche hardiesse d’allures qu’il avait déployée dans l’origine du procès. Calvin n’était pas également heureux sur tous les points. Si la lutte contre l’hérétique marchait au gré de ses désirs, il n’en était pas de même de la lutte contre les libertins. Si d’un côté il paraissait sûr de la victoire, de l’autre il était menacé d’un grave échec.

Bertheher s’était présenté devant le conseil, sollicitant la révocation de l’arrêté qui lui interdisait la cène. Calvin s’y opposa vainement ; le Petit conseil autorisa Berthelier à s’approcher de la table sacrée, s’il se sentait net en sa conscience. Cette décision fut prise le vendredi ler septembre ; or, le dimanche suivant, c’est-à-dire le surlendemain, devait se célébrer la sainte cène. Berthelier comptait user du privilège que venait de lui accorder le Petit conseil ; il devait se rendre au temple, et là recevoir de la main de Calvin cette coupe dont Calvin le déclarait indigne. Quel outrage pour le réformateur ! quelle humiliation pour l’autorité religieuse ! Si le coup n’est pas détourné, c’en est fait de la discipline ecclésiastique et de la réforme des mœurs. Dans une conjoncture aussi critique, Calvin ne perd pas de temps en vaines délibérations ; il se rend auprès des syndics, et obtient avec peine que le Petit conseil s’assemble de nouveau pour entendre ses réclamations. Il épuise