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Page:Ramuz - Œuvres complètes - tome 8, 1941.djvu/239

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Car c’est vers elle qu’ils s’étaient tous portés, mais vainement la cherchaient-ils, vainement se demandaient-ils l’un à l’autre : « Et elle ? » personne n’avait vu Marie. Et une grande inquiétude leur venait, comme si de nouveau ils eussent été sans protection.

Heureusement qu’à ce moment quelqu’un cria : « La voilà ! » Aussitôt tout fut oublié. Tous ils se poussaient du côté où elle s’était montrée, qui était dans le fond d’une petite rue, laquelle conduisait chez elle.

Elle venait, ils se poussaient, ils l’entourèrent, ils auraient voulu lui parler : ils ne pouvaient pas ; alors, du moins, n’est-ce pas ? être là, du moins la voir et la toucher.

Mais qu’est-ce qu’il y avait de nouveau ? C’est elle, à présent, qui semblait inquiète ; elle les écartait d’elle, disant : « Laissez-moi ! Laissez-moi !… »

Elle continuait son chemin, les écartant ; puis, comme si elle essayait d’un dernier moyen sans trop y croire : « Et vous, ne l’avez-vous pas vu, mon père ? vous ne l’auriez pas rencontré ? J’ai été le chercher chez nous… » Elle s’arrêtait. « Il n’y était pas. »

Ils étaient tombés à genoux, des femmes baisaient le bas de sa jupe.

C’est que lui, hélas ! n’osait toujours pas, il continuait de se cacher. Même maintenant que tout revivait, et que tous avaient été pardonnés, et que clairement ce pardon était écrit partout dans l’air, il n’avait pas encore osé venir, pensant : « Même si tous l’ont mérité, moi, je ne le mérite pas. »

Il fallut d’abord qu’il fût découvert, il fallut ensuite qu’on l’amenât.

Il se laissa tomber, la face contre terre.

Et Marie :

— Est-ce toi ? Père, père ! Est-ce bien toi ?…