Page:Ramuz - Aline, 1905.djvu/119

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comme une lampe où l’huile manque. Il y avait quelque chose qui était changé, qui allait changeant toujours plus. Elle restait la même, mais Julien n’était plus le même. Il était pareil à un homme qui s’est assis à une table servie et qui se lève quand il est rassasié. Il se lève et on voit qu’il va s’en aller et qu’on ne peut plus le retenir, parce que l’amour qu’il avait était une faim qui passe comme la faim passe. Et elle resterait seule. Elle sentait le bonheur glisser entre ses bras comme une botte de fleurs dénouée.

Ensuite la saison s’élevait entre eux, avec toutes les autres choses. Les jours devenaient courts, les nuits devenaient froides. Aline cherchait les étoiles des yeux et ne les trouvait plus. On avait fauché les regains. La lune au commencement de sa carrière était comme un anneau brisé.