Page:Ramuz - Aline, 1905.djvu/191

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dans la chambre. Il n’y avait qu’un étroit passage entre le lit et le berceau. Elle allait jusqu’à la fenêtre et s’en revenait, et recommençait. Quelque chose comme une main la tenait à la nuque et la poussait en avant. Ses pas retentissaient dans sa poitrine. Il lui semblait qu’elle marchait depuis deux jours.

Elle s’assit. Elle prit les boucles d’oreilles dans sa poche ; elle les tournait et les retournait entre ses doigts d’un air égaré. Elle pensait : « Elles sont bien jolies, ces boucles d’oreilles ; si je pouvais les mettre, mais je ne peux pas les mettre. Il y a du corail au bout. C’est beau, le corail. »

Elle se remit à marcher. Et, pour la première fois, songeant au passé, elle sentit la colère et la vengeance dans son cœur. Elle se disait : « Ils m’ont fait trop de mal. Le pauvre petit ! C’est leur faute,