Page:Ramuz - Joie dans le ciel.djvu/66

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bâtir que sur les biens passagers. On est parti de nuit ; on est allé plus haut que les bois, plus haut que l’herbe ; et, toutes ces richesses données par le bon Dieu, on les a laissées derrière nous, pour ne plus être entourés, si loin qu’on pouvait voir, que par rien du tout de bon. Semez-y le blé, vous verrez, essayer d’y planter les pommes de terre ! Mauvais pays, pays maudit, pays mis justement par le bon Dieu plus haut que l’autre et pas à portée, mais on était tenté par le Démon. Le soleil s’était levé, on suait à grosses gouttes. C’était ce grand pierrier, vous savez, qui est droit dessous les Rochers de Bise, et plus on monte, plus il devient raide, pourtant on allait toujours. De temps en temps, je disais à mon frère : « Est-ce là ? » Il me répondait : « Pas encore. » Et on allait. On a fini par arriver au pied des rochers ; il y