Page:Ramuz - La beauté sur la terre, 1927.djvu/111

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— Oh !

— Dis donc, arrive avec Perrin.

Il disait :

— C’est que ça n’est pas du tout commode à manœuvrer, ces bateaux, mais du moment que la chose doit se faire…

Les deux hommes arrivent ; il disait :

— Il vous faut me donner un coup de main…

Ils étaient bien un peu étonnés, pourtant ils ont tiré le bateau à eux trois jusque devant la maison.

On voyait que tout se faisait à la fois : les tuiles étaient arrivées. On a couché la Coquette, la quille en l’air, sur deux chevalets. Et tout se faisait à la fois parce que voilà qu’un peu plus tard Rouge a dit : « La Coquette, c’est un nom qui ne veut rien dire, c’est un nom qui se voit partout… »

Il était maintenant en train de râcler avec un couteau la vieille couleur du bateau et cette couleur s’en allait, laissant voir le bois tout déshabillé : il a repris : « Et puis, du moment qu’on y est, on pourrait le rebaptiser… Si toutefois vous êtes d’accord, Mademoiselle Juliette, a-t-il dit ; et, dans ce cas, vous seriez la marraine… On l’appellerait la Juliette. C’est oui ?… Eh bien, c’est ça, on va lui donner votre nom. C’est un joli nom. »

Tout se faisait à la fois. C’était toujours ce même soir ; la poussière du beau temps flottait partout à l’horizon. Comme quand c’est un soir de moisson et une même poussière brune monte sur les routes et devant les granges. Le soleil était