Page:Ramuz - La beauté sur la terre, 1927.djvu/203

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Il n’a eu, alors, le bossu, qu’à faire signe à Juliette. Il a dit à Juliette : « Voulez-vous qu’on aille faire un petit tour ? »

Il était arrivé, ce jour-là, dans l’après-midi ; il n’a eu qu’à profiter de ce que Rouge était parti pour le village ; et, comme Juliette, de la tête, montrait Décosterd :

— Oh ! rien à craindre… Je vous expliquerai ça, mais pas ici, parce qu’ici ce n’est pas chez nous.

— Où est-ce, chez nous ?

— Vous verrez.

Le bossu parle une drôle de langue, à peine si elle comprend ce qu’il dit.

Il s’est levé difficilement de dedans les pierres plates et les morceaux de tuile rose ; il passe la courroie de son instrument à son épaule ; la première chose qu’il a faite a été de prendre son instrument.

Elle était rentrée dans sa chambre ; elle reparaît, elle a changé de robe, elle a un petit châle noir sur les épaules.

Décosterd n’avait toujours l’air de rien, Décosterd semblait ne rien voir, Décosterd leur tournait le dos.

Ils ont eu à leur droite les dessins que faisaient sur l’eau les coups de bise, comme quand une dame ouvre son éventail. Une belle dame au théâtre, et, d’un seul petit mouvement de ses longs doigts couverts de bagues, elle déplie le grand éventail de moire bleue orné de paillettes d’argent. La nature ne se dérange pas pour eux, ils ne dérangent rien dans la nature. Ils sont allés entre les