Page:Ramuz - La grande peur dans la montagne, 1926.djvu/122

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
124
LA GRANDE PEUR

laissés debout comme pour la figurer ; quelques troncs d’un côté du chemin, et tout juste le dessus de la gorge de l’autre, parce que plus bas elle était bouchée comme par un dépôt de vase.

Une montée encore sur le chemin dans la montagne : mais elle s’est faite d’abord dans rien du tout. Peu à peu, pourtant, Pont et le garde s’étaient élevés ; finalement ils étaient sortis de la forêt : là ils ont mis leur tête, ils ont mis leurs épaules hors de la couche du brouillard et de sa croûte. Un peu de vent qui commençait à souffler leur apporte d’en haut des crêtes une légère vapeur comme quand la neige sèche vient à vous de derrière un talus. On a vu les crêtes continuer à fumer vers eux pendant qu’ils s’attaquaient aux lacets ; ensuite, c’est toute la masse des nuées qui a commencé à se fendiller, qui a commencé à bouger, à se balancer dans l’air devenu plus chaud. Et eux-mêmes montaient les lacets, quand, tout à coup, les vapeurs sont montées, partant de bas en haut devant eux comme des ballons, à travers l’espace de l’air. La crête du pâturage s’était donc trouvée inoccupée quand Pont et le garde l’eurent atteinte ; en arrière de la crête, le pâturage lui aussi s’of-