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DANS LA MONTAGNE

Il parlait tout seul comme ça, et on voyait par moment Joseph lever lui aussi les yeux sur lui, après quoi il regardait ailleurs. Ils se raccrochaient encore à la vie et à être tant qu’ils pouvaient, mais est-ce qu’ils allaient en avoir longtemps la force ? Voilà qu’ils ne se sont plus levés qu’avec peine, et, l’un après l’autre, ils se sont traînés vers leur lit, tandis que Clou les regardait l’un après l’autre se lever, s’en aller, puis il les a entendus se laisser tomber dans la paille ; — après quoi il a été seul, un moment, près du feu, n’étant pas pressé d’aller dormir, car à présent il couchait seul ayant un cadre tout entier à lui.

Clou couchait seul dans le sien avec ses cailloux ; et c’est seulement peu après qu’il eut été rejoindre ses cailloux que la chose a commencé, parce que le troupeau ne dormait pas, lui non plus, sous sa roche.

Peu après que Clou avait été se coucher, on a entendu que les bêtes s’agitaient, par une sonnaille secouée, une de ces cloches qu’elles portent pendues autour du cou à une large courroie de cuir, — en beau bronze, avec des dessins dessus. Comme si quelqu’un approchait, et une première bête inquiète de voir qu’on vient, tourne la tête,