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DANS LA MONTAGNE

jours, et le glacier par moment craquait. Il y avait ces craquements du glacier de plus en plus fréquents, cette toux du glacier de plus en plus forte et profonde, — seulement c’était à présent le tour de Barthélemy de ne pas entendre, étant distrait par ses pensées, tandis qu’il continuait à observer Joseph, se demandant : « D’où est-ce qu’il peut bien venir comme ça ? » puis il se disait : « Heureusement qu’il revient. On redescendra ensemble au chalet. » Et ça craquait. Barthélemy ne faisait pas attention que ça craquait toujours plus fort au-dessus de lui et jusque tout en haut de ces étages verts et bleus posés l’un au-dessus de l’autre ; il n’a pas fait attention non plus qu’en même temps le plafond du brouillard commençait à se fendre. Il n’a pas compris le geste que Joseph a fait tout à coup, quand une de ces fenêtres s’est ouverte au-dessus de lui ; mais il voit alors que Joseph est armé, il voit que le geste de Joseph a été de porter la main à son épaule, puis de prendre sa carabine dans ses deux mains ; puis on a vu le pierrier se mettre à rouler tout entier vers Joseph comme de l’eau, et c’était comme si on venait dans le pierrier, pourtant on ne voyait personne. Il n’y a eu personne, et il y avait en