Page:Ramuz - Les Signes parmi nous.djvu/116

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Un gros, large bateau et lourd, vert-noir contre le gris de l’eau. L’aide vous fait face, Pinget vous tourne le dos. L’aide tire sur les rames qui viennent difficilement, vu l’épaisseur du liquide ; on dirait de l’huile.

Comme du sable quant à la couleur, cette eau, comme de l’huile quant à la nature ; on trempe les rames dedans, ça reste mort ; on les relève, c’est mort ; ça ne s’amuse plus des rames, ça ne badine plus en gouttelettes autour ; ça colle après, ça file gras ; ils montent contre l’eau, puis virent ; ils se mettent alors à pencher de côté.

Il y a plein l’air de toiles brunes tendues, qui font des entrecoupements ; la rive et tout ce qu’elle porte semblent taillés dans la roche.

Arbres, maisons, prés, champs, terrain, tout est d’une même matière ; c’est taillé à grands pans contrariés, gris sur gris.