Page:Raoul - Trois satiriques latins, vol 1 Juvénal, 1842.djvu/77

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Sur de frêles étais à peine soutenue,
La mage incessamment semble près de crouler ;
Et quand du mur qui penche et qu’on sent vaciller,
L’architecte avec art déguisant la menace,
En a légèrement replâtré la surface,
Il veut que désormais, grâce à ses soins prudents,
Nous dormions sans frayeur sous ces débris pendants.
Hâtons-nous de quitter un lieu si peu tranquille ;
Sortons : courons chercher quelque lointain asile,
Où, sans craindre le feu, les voleurs et le bruit,
Avec sécurité l’on passe au moins la nuit.
Quels cris, quelle rumeur dans tout le voisinage !
Ucalégon tremblant emporte son ménage,
Et déjà l’incendie a gagné le premier.
Tu ne soupçonnes rien, toi, près du colombier.
Le pauvre sous la tuile, où le danger l’assiège,
Est brûlé le dernier : c’est là son privilège.



Codrus et Procula n’avaient qu’un méchant lit ;
Encor pour tous les deux était-il trop petit.
Un vieux meuble, étayé d’un Centaure en ruines,
Supportait une amphore et six tasses mesquines,
Et des rats ignorants, ligués avec les vers,
Au fond d’un coffre usé, rongeaient ses doctes vers.
À vrai dire, Codrus n’avait rien ; mais encore,
Ce rien, la flamme, hélas ! tout entier le dévore !
Pour comble de malheur, nu, pressé par la faim,
Réduit à mendier un asile et du pain,
En vain il va partout tramant son infortune.
La ville entière est sourde à sa plainte importune.
Que l’incendie, au lieu du grabat de Codrus,
Ait détruit le palais du riche Asturiens,
Quel désastre ! quel deuil ! les grands sont en alarmes,
Les tribunaux fermés, les matrones en larmes.
C’est alors que du feu l’on maudit les fureurs !
Alors que de la ville on ressent les malheurs !