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joyeuse avec une tristesse subtile qui s’insinue jusqu’au cœur et le rend lâche.

De la tristesse… Pourquoi ? Cette lumière est belle, ce paysage est beau. Sur les reliefs ciselés par l’hiver, dur sculpteur, sur le cobalt éblouissant de l’horizon, une brume transparente a passé l’estompe. Les plans reculent, le ciel s’allège, s’aère, laisse flotter des nuages dans la trame plus molle de l’éther ; le soleil n’est plus ce feu blanc d’arc électrique qui projetait sur la neige l’ombre des sapins en une masse unie, d’un bleu profond : il est déjà vermeil et lorsqu’il décline, la lumière frisante de ses rayons dore les contours. Des touches de gris se mêlent aux ombres, brouillent finement les traits du dessin, naguère si pur.

Est-ce cela que je regrette, ces beaux traits pétrifiés, cette perfection de Gorgone