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LA MAISON DES BORIES

— Elle va chercher le médecin. N’aie pas peur, elle sera bientôt de retour.

M. Durras hocha la tête, ferma les yeux et s’appuya sur ses oreillers, dans le fauteuil où on l’avait assis. Il était encore plus pâle que d’habitude et respirait péniblement, les traits crispés par une expression de souffrance.

Le frère et la sœur se dévêtirent devant le feu flambant et crépitant. Le Corbiau ne bougeait pas, les yeux fixés sur Amédée. Laurent la secoua par le bras.

— Qu’est-ce que tu attends pour te déshabiller ? Enlève-moi ça, ouste, c’est trempé.

La petite fille poussa un profond soupir, défit ses sandales et retira sa robe, avec des gestes lents, suspendus, de nageur entre deux eaux.

Quand ils furent assis tous les trois, bien au sec, devant la cheminée, le Corbiau se pencha vers Laurent, chuchota très bas :

— J’ai vu celui qui a tiré. C’est un petit gros, avec une casquette.

— Où ça ?

— Dans le champ, derrière les arbres. Il s’est sauvé tout de suite.

— Je n’ai rien vu, dit Laurent, tu es bien sûre ?

Elle hocha la tête.

— Sûre. Je le dirai aux gendarmes. Et toi qu’est-ce que tu diras ?

— Rien, puisque je n’ai rien vu.

— Qu’est-ce que vous racontez ? demanda Lise en poussant sa frimousse curieuse entre leurs têtes rapprochées.

— Rien, coupa Laurent, d’un ton sévère.

Des sourcils et des lèvres, il fit signe au Corbiau de se taire. C’était là des soucis de grande personne.

— Si, reprit Lise en secouant ses boucles. Le Corbiau te raconte une z’histoire sur celui qui a tiré.