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TROIS PARMI LES AUTRES

la scène des adieux. Mais c’est bien triste. Enfin vous verrez, Mowgli, vous êtes le maître de la situation.

— Je verrai. En tout cas, vous, la Jungle, préludez. Et n’oubliez pas que c’est à vous de combler les silences.

— Entendu. Allons dans le verger qui nous tiendra lieu de forêt vierge.

— Vous me soufflerez, Antoinette ? demanda André en se glissant à côté d’elle. Je n’ai pas l’habitude de faire parler les paons.

— On peut dire des blagues ? demanda Bertrand qui n’arrêtait pas de chuchoter et de rire avec Suzon-Bagheera.

— Bien entendu, tout ce qui nous passera par la tête, autrement ça ne serait pas drôle. Il s’agit surtout de nous mettre dans la peau des personnages.

— Facile à dire, marmotta le curé. On n’entre pas comme ça dans la peau d’un ours. Vous nous ferez tourner en bourriques, mademoiselle Antoinette, avec vos bêtes !

Riant comme des fous, ils envahissent le verger. Antoinette s’allonge sur le sol pour avoir dans la gorge le goût de l’herbe qu’on croit mâcher alors qu’on la respire.

— Vous, la Jungle, préludez…

Il faut se montrer digne de cette confiance autoritaire. La Jungle a le trac. Son cœur fait des bonds rythmiques de lièvre pourchassé. Va-t-elle seulement trouver un filet de voix ?

Sur un brin d’herbe, un de ces insectes rouge et noir qu’on appelle gendarme agite ses antennes. Antoinette pense qu’il lui apporte l’encouragement