Page:Ratel - Trois parmi les autres, 1946.djvu/155

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
145
TROIS PARMI LES AUTRES

— Mor a dit que le printemps était commencé. Il a vu les feuilles nouvelles.

— J’ai vu les feuilles nouvelles et j’ai vu le village des hommes.

Mowgli relève la tête.

— Et que faisaient les hommes dans leurs maisons, Mor ?

— Euh ! rien de bien intéressant, petit d’homme.

— Petit d’homme ? Suis-je un petit d’homme ? Je les hais. Qu’ils restent sous leurs toits de boue. Je suis le fils du loup. Où t’en vas-tu, Frère Gris, et toi, Bagheera ?

— Nous allons chasser, répond Bagheera. Tu en auras ta part, petit frère.

Et tous deux s’en vont secouer un prunier hors de portée de voix.

— Ah zut, gémit l’abbé Baloo, déconfit, s’ils s’en vont, à qui vais-je faire mes confidences sur l’inquiétude que m’inspire mon petit d’homme ?

Voici maintenant Mowgli devant le village hindou, figuré par l’espace d’herbe compris entre ces quatre pommiers. Il en fait le tour à pas longs et souples et tous les yeux sont fixés sur lui, qui donne le beau spectacle de la grâce mâle. Son visage exprime l’inquiétude et la mélancolie. En passant, il regarde Annonciade, et le sourire de Robert Gilles, qui est comme un bref dialogue avec lui-même, brille un instant. Puis il se rappelle qu’il est Mowgli et reprend ses allures de bel animal tourmenté par l’éveil de l’humanité.

Handsone men are slightly sunburnt. Quelle scie, cette obsession, qui ne veut rien dire…

— Mowgli, appelle la voix lointaine de la Jungle, où est Mowgli ?