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Histoire philosophique
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Ainsi la politique inhumaine de l’état, s’est ôté l’unique moyen de s’adoucir elle-même, en adoucissant le caractère national. Le Japonois, ardent comme son climat, agité comme la mer qui l’environne, avoit besoin de la plus grande activité, que le commerce le plus vif pouvoit seul lui donner. Pour n’être pas forcé de le contenir par les supplices, il falloit l’exercer par les travaux. Son inquiétude devoit avoir une carrière libre au-dehors, si l’on craignoit qu’elle n’allumât un feu séditieux au-dedans. Cette énergie de l’âme, qui est dégénérée en fanatisme, se seroit exaltée en industrie. La contemplation se seroit changée en action ; la crainte des peines en amour du plaisir. Cette haine de la vie qui tourmente le Japonois enchaîné, gourmande, effarouché par le frein des loix qu’il ronge dans sa rage, auroit cédé, dans son âme, à la curiosité de courir les mers & de voir les nations. En changeant souvent de place & de climat, il eût insensiblement changé de mœurs, d’opinions, de caractère ; & ce changement étoit un bien pour lui, comme il l’est pour la plupart des peuples. Par le commerce, on est moins citoyen peut-être, mais on devient plus