Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v10.djvu/160

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iſolés, ou plutôt elle n’a pas un ſeul principe qui ne tienne à toutes les branches d’adminiſtration. L’état eſt une machine très-compliquée, qu’on ne peut monter ni faire agir ſans en connoître toutes les pièces. On n’en ſauroit preſſer ou relâcher une ſeule, que toutes les autres n’en ſoient dérangées. Tout projet utile pour une claſſe de citoyens ou pour un moment de criſe, peut devenir funeſte à toute la nation, & nuiſible pour un long avenir. Détruiſez ou dénaturez un grand corps, ces mouvemens convulſifs, qu’on appelle coups d’état, agiteront la maſſe nationale, qui s’en reſſentira peut-être durant des ſiècles. Toutes les innovations doivent être inſenſibles, naître du beſoin, être inſpirées par une ſorte de cri public, ou du moins s’accorder avec le vœu général. Anéantir ou créer tout-à-coup, c’eſt empirer le mal & corrompre le bien. Agir ſans conſulter la volonté générale, ſans recueillir, pour ainſi dire, la pluralité des ſuffrages dans l’opinion publique ; c’eſt aliéner les cœurs & les eſprits, tout décréditer, même le bon & l’honnête.