Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v2.djvu/345

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Par un contraſte bizarre, & dont l’effet eſt toujours choquant, ces belles filles traînent à leur ſuite un muſicien difforme & d’un âge avancé, dont l’emploi eſt de battre la meſure avec un inſtrument de cuivre, que nous avons depuis peu emprunté des Turcs pour ajouter à notre muſique militaire, & qui aux Indes ſe nomme Tam. Celui qui le tient répète continuellement ce mot avec une telle vivacité, qu’il arrive par degrés à des convulſions affreuſes, tandis que les balliadères, échauffées par le déſir de plaire & par les odeurs dont elles ſont parfumées, finiſſent par être hors d’elles-mêmes.

Les danſes ſont preſque toutes des pantomimes d’amour. Le plan, le deſſein, les attitudes, les meſures, les ſons, & les cadences de ces ballets, tout reſpire cette paſſion, & en exprime les voluptés & les fureurs. Tout conſpire au prodigieux ſuccès de ces femmes voluptueuſes : l’art & la richeſſe de leur parure, l’adreſſe qu’elles ont à façonner leur beauté. Leurs longs cheveux nous, épars ſur leurs épaules ou relevés en treſſes, ſont chargés de diamans & parſemés de fleurs. Des pierres précieuſes enrichiffent leurs col-