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Histoire philosophique

peut-être pour cela qu’on voit chez pluſieurs peuples ſauvages les femmes chargées des premiers objets de l’adminiſtration civile, qui ſont une ſuite de l’économie domeſtique. Tant que l’état n’eſt qu’une eſpèce de ménage, elles gouvernent l’un & l’autre. C’eſt alors ſans doute que les peuples ſont les plus heureux, ſur-tout quand ils vivent ſous un climat où la nature n’a preſque rien laiſſé à faire aux hommes.

Tel eſt celui qu’habitent les Cochinchinois. Auſſi ce peuple goûte-t-il dans l’imperfection de ſa police un bonheur qu’on ne ſauroit trop lui envier dans le progrès d’une ſociété plus avancée. Il ne connoît ni voleurs, ni mendians. Tout le monde a droit d’y vivre dans ſon champ ou chez autrui. Un voyageur entre dans une maiſon de la peuplade où il ſe trouve, s’aſſied à table, mange, boit, ſe retire, ſans invitation, ſans remerciement, ſans queſtion. C’eſt un homme ; dès-lors il eſt ami, parent de la maiſon. Fût-il d’un pays étranger, on le regarderoit avec plus de curioſité ; mais il ſeroit reçu avec la même bonté.

Ce ſont les ſuites & les reſtes du gouvernement des ſix premiers rois de la Cochin-