Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v3.djvu/26

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même, mis par ſa mort au rang des immortels, fut la première divinité de ces affreuſes contrées, où les rochers & les bois étoient teints & conſacrés par le ſang humain. Ses ſectateurs croyoient l’honorer, en l’appellant le dieu des armées, le père du carnage, le dépopulateur, l’incendiaire. Les guerriers, qui alloient ſe battre, faiſoient vœu de lui envoyer un certain nombre d’âmes qu’ils lui conſacroient. Ces âmes étoient le droit d’Odin, La croyance univerſelle étoit, que ce Dieu ſe montroit dans les batailles, tantôt pour protéger ceux qui ſe défendoient avec courage, & tantôt pour frapper les heureuſes victimes qu’il deſtinoit à périr. Elles le ſuivoient au séjour du ciel, qui n’étoit ouvert qu’aux guerriers. On couroit à la mort, au martyre, pour mériter cette récompenſe. Elle achevoit d’élever juſqu’à l’enthouſiaſme, juſqu’à une ſainte ivreſſe du ſang, le penchant de ces peuples pour la guerre.

Le chriſtianiſme renverſa toutes les idées qui formoient la chaîne d’un pareil ſyſtême. Les miſſionnaires avoient beſoin de rendre leurs prosélytes sédentaires, pour travailler utilement à leur inſtruction ; & ils réuſſirent