Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v3.djvu/67

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de la gloire. Chacun vouloit vaincre l’ennemi & s’enrichir de ſes dépouilles. L’éducation nationale étoit toute militaire, & les foyers paroiſſoient convertis en camps. Des trophées innombrables ornoient les temples, les châteaux, les toits les plus ſimples. Une génération de ſoldats étoit remplacée par une génération ſemblable ou plus audacieuſe. Cet enthouſiaſme avoit gagné les dernières claſſes, comme les claſſes plus élevées. Les travaux nobles, les travaux obſcurs étoient également dédaignés ; & un Suédois ne ſe croyoit né que pour vaincre & pour faire la deſtinée des empires. Cette fureur martiale avoit paſſé toutes les bornes ſous Charles XII : mais elle s’éteignit après la mort tragique de cet homme extraordinaire.

Ce fut un autre peuple. L’épuiſement de l’état ; la perte des conquêtes anciennes ; l’élévation de la Ruſſie : tout dégoûtoit les plus confians d’une carrière qu’il n’étoit plus poſſible de ſuivre avec quelque eſpoir de ſuccès, ſans même achever la ruine d’un édifice ébranlé par des ſecouſſes violentes & réitérées. La paix étoit le vœu, & de ceux qui avoient vieilli ſous des tentes, & de ceux