Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v4.djvu/417

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

héritiers de leur infortune, les hommes réſolurent unanimement de n’avoir aucun commerce avec les femmes. Cette triſte conjuration contre la nature & contre le plus doux de ſes plaiſirs, l’unique événement de cette eſpèce, que l’hiſtoire nous ait tranſmis, ſemble avoir été réſervée à l’époque de la découverte du Nouveau-Monde, pour caractériſer à jamais la tyrannie Eſpagnole. Que pouvoient oppoſer les Américains à la ſoif de détruire, que l’horrible vœu de ne ſe reproduire jamais ? Ainſi la terre fut doublement ſouillée ; du ſang des pères, & du germe des enfans.

Dès-lors, cette terre fut comme maudite pour ſes barbares conquérans. L’empire qu’ils ayoient fondé s’écroula bientôt de toutes parts. Les progrès du déſordre & du crime furent rapides. Les fortereſſes les plus importantes tombèrent en ruine. Il n’y eut dans le pays ni armes, ni magaſins. Le ſoldat qui n’étoit ni exercé, ni nourri, ni vêtu, devint mendiant ou voleur. On oublia juſqu’aux élémens de la guerre & de la navigation, juſqu’au nom des inſtrumens propres à ces deux arts ſi néceſſaires.