Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v5.djvu/157

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nations qui alloient à la mer du Sud ou aux grandes Indes, & leur livraient leurs bœufs, leurs fruits, leurs légumes, toutes leurs productions, pour des armes, de l’eau-de-vie, des toiles & des habits. Avec le mépris de l’or, ils avoient pour toutes les commodités que la nature ne leur fourniſſoit pas une indifférence qui eût fait honneur à des peuples vertueux.

L’écume & le rebut des ſociétés policées peut former quelquefois une ſociété bien ordonnée. C’eſt l’iniquité de nos loix ; c’eſt l’injuſte répartition des biens ; ce ſont les ſupplices & les fardeaux de la misère ; c’eſt l’inſolence & l’impunité des richeſſes ; c’eſt l’abus du pouvoir, qui fait ſouvent des rebelles & des criminels. Réuniſſez tous ces malheureux qu’une rigueur ſouvent outrée a bannis de leurs foyers ; donnez-leur un chef intrépide, généreux, humain, éclairé, vous ferez de ces brigands un peuple honnête, docile, raiſonnable. Si ſes beſoins le rendent guerrier, il deviendra conquérant ; & pour s’agrandir, fidèle obſervateur des loix envers lui-même, il violera les droits des nations : tels furent les Romains. Si