Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v5.djvu/372

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c’eſt ici qu’il faut périr, plutôt que dans l’infamie du ſupplice. Ainſi le ſang d’un homme accusé de lâcheté devint un germe d’héroïſme.

À ce reſſort de crainte fait pour vaincre la peur, ſe joignit un encouragement qui annonçoit le rétabliſſement de l’eſprit public. La diſſipation, le plaiſir, le désœuvrement, ſouvent le crime & la corruption des mœurs forment des liaiſons vives & fréquentes dans la plupart des états de l’Europe. Les Anglois ſe communiquent moins, vivent moins enſemble, ont moins, ſi l’on veut, le goût de la ſociété que les autres peuples ; mais l’idée d’un projet utile à leur pays les raſſemble. Ils n’ont alors qu’une âme. Toutes les conditions, tous les partis, toutes les ſectes, concourent à ſon ſuccès, avec une généroſité qui n’a point d’exemple dans les contrées où l’on n’a point de patrie à ſoi. Et en effet, pourquoi s’occuperoit-on de la gloire d’une nation, lorſqu’on ne peut ſe promettre de ſes ſacrifices qu’un accroiſſement de misère ? lorſque les victoires & les défaites ſont également funeſtes ; les victoires par des impôts qui les préparent,