Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v7.djvu/83

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ne l’entend pas. Si, par haſard, il eſt entendu, la jalouſie traduit ſes projets comme des rêves ſublimes, & les fait échouer. L’intérêt général de la multitude ſuppléeroit peut-être à la pénétration du génie, ſi on le laiſſoit agir en liberté : mais il eſt ſans ceſſe contrarié par l’autorité dont les dépoſitaires ne s’entendent à rien, & prétendent ordonner de tout. Quel eſt celui qu’ils honoreront de leur confiance & de leur intimité ? c’eſt le flatteur impudent qui, ſans en rien croire, leur répétera continuellement qu’ils ſont des êtres merveilleux. Le mal ſe fait par leur ſottiſe, & ſe perpétue par une mauvaiſe honte qui les empêche de revenir ſur leurs pas. Les fauſſes combinaiſons s’épuiſent avant qu’ils aient rencontré les vraies, ou qu’ils puiſſent ſe réſoudre à les approuver, après les avoir rejetées. C’eſt ainſi que le déſordre règne par l’enfance des ſouverains, l’incapacité ou l’orgueil des miniſtres, & la patience des victimes. On ſe conſoleroit des maux paſſés & des maux préſens, ſi l’avenir devoit changer cette deſtinée : mais c’eſt une eſpérance dont il eſt impoſſible de ſe bercer. Et ſi l’on demandoit au philoſophe à quoi fervent