Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v8.djvu/24

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nature cachoit dans le continent une fontaine dont les eaux avoient la vertu de rajeunir tous les vieillards aſſez heureux pour en boire, La chimère de l’immortalité fut toujours la paſſion des hommes, & la conſolation du dernier âge. Cette idée enchanta l’imagination romaneſque des Eſpagnols. La perte de pluſieurs d’entre eux, qui furent victimes de leur crédulité, n’ébranla pas la confiance des autres. Plutôt que de ſoupçonner que les premiers avoient péri dans un voyage où la mort étoit ce qu’il y avoit de plus sûr ; on penſa que s’ils ne reparoiſſoient plus, c’étoit parce qu’ils avoient trouvé le ſecret d’une jeuneſſe éternelle, & ce séjour de délices d’où l’on ne vouloit plus ſortir.

Ponce de Léon fut le plus célèbre entre les navigateurs qui s’infatuèrent de cette rêverie. Perſuadé qu’il exiſtoit un troiſième monde dont la conquête étoit réſervée à ſa gloire, mais croyant que ce qui lui reſſort de vie étoit trop court pour l’immenſe carrière qui s’ouvroit devant ſes pas, il réſolut d’aller renouveler ſes jours & recouvrer la jeuneſſe dont il avoit beſoin.