Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v8.djvu/247

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me promis-tu pas de me couvrir toujours de tes armes & de tes voiles ? N’ai-je pas combattu pour tes droits, & défendu le ſol que tu m’avois donné ? Après l’avoir fertilisé de mes ſueurs, ne l’ai-je pas arrosé de mon ſang pour te le conſerver ? Tes enfans ſont mes pères ou mes frères ? tes loix faiſoient ma gloire, & ton nom mon honneur. J’ai tâché de l’illuſtrer, ce nom, chez les nations même qui ne le connoiſſoient pas, Je t’avois fait des amis & des alliés parmi les ſauvages. J’aimois à croire qu’un jour je pourrois être l’égale de tes rivaux, la terreur de tes ennemis. Mais non, tu m’as abandonnée. Tu m’as engagée à mon inſu, par un marché, dont le ſecret même étoit une trahiſon. Mère inſenſible, ingrate, as-tu pu rompre, contre le vœu de la nature, les nœuds qui m’attachoient à toi par ma naiſſance même ? Quand je te rendois, par le tribut de mes pénibles labeurs, le ſang & le lait que j’avois reçu de tes veines, je n’aſpirois qu’à la conſolation de vivre & de mourir ſous la loi. Tu ne l’as pas voulu. Tu m’as arrachée à ma famille pour me