Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v8.djvu/479

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qu’on nomme au haſard, ſont auſſi-tôt mis en priſon, accusés de ſortilège, condamnés à être pendus, & leurs cadavres ſont abandonnés aux bêtes féroces, aux oiſeaux de proie. Peu de jours après, ſeize perſonnes ſubiſſent le même ſort, avec un juriſconſulte, qui, refuſant de plaider contre elles, eſt, dès-lors, convaincu d’être leur complice. Ces horribles & lugubres ſcènes, embrâſent l’imagination de la multitude. La foibleſſe de l’âge, les infirmités de la vieillerie, l’honneur du ſexe, la dignité des places, la fortune, la vertu ; rien ne met à couvert d’un odieux ſoupçon, dans l’eſprit d’un peuple obsédé par les fantômes de la ſuperſtition. On immole des enfans de dix ans ; on dépouille de jeunes filles ; on cherche ſur tout leur corps, avec une impudente curioſité, des marques de ſorcellerie ; on prend des taches ſcorbutiques que l’âge imprime à la peau des vieillards, pour des empreintes du pouvoir infernal. Le fanatiſme, la méchanceté, la vengeance choiſiſſent, à leur gré, leurs victimes. Au défaut de témoins, on emploie les tortures ; & les bourreaux dictent eux-mêmes les aveux qu’ils veulent obtenir. Si les magiſtrats ſe