Page:Raynal - Histoire philosophique et politique des établissemens et du commerce des Européens dans les deux Indes, v8.djvu/54

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avec toute la magie de ſon coloris les biens & les maux de vos contrées ſi policées. Son tableau vous tranſportera d’admiration, je n’en doute point : mais croyez-vous qu’il laiſſe dans vos âmes l’émotion délicieuſe que vous reſſentez encore ? L’eſtime, l’amour, la vénération, que vous venez d’accorder à des ſauvages, vous l’inſpirera-t-il pour vos compatriotes ? Vous ne ſeriez que de misérables ſauvages dans les forêts ; le dernier des ſauvages ſeroit un homme reſpectable dans vos cités.

Une ſeule félicité manquoit aux Américains : le bonheur d’aimer paſſionnément les femmes. En vain ont-elles reçu de la nature une taille avantageuſe, de beaux yeux, des traits agréables, des cheveux noirs, longs & bien placés. Tous ces agrémens ne ſont comptés que durant le tems de leur indépendance. À peine ont-elles ſubi le joug de l’hymen, que l’époux même qu’elles chériſſent uniquement, devient inſenſible à des charmes qu’elles prodiguoient avant le mariage. À la vérité, le genre de vie où cet état les condamne, n’eſt pas favorable à la beauté. Leurs traits s’altèrent ;