Aller au contenu

Page:Raynaud - Baudelaire et la Religion du dandysme, 1918.djvu/53

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

mann et qui, à l’occasion, posait sans voiles, quand un artiste de renom l’en priait ?

À ne tenir compte que des madrigaux de poètes, c’était une créature délicieuse, spirituelle, pleine de charme et de distinction. Gautier nous dit qu’elle était « supérieure aux autres femmes ». Feydeau nous assure qu’elle portait son joli nom de présidente « avec tout l’esprit et la bonne grâce imaginables »[1].

  1. Voici les lignes pleines d’intérêt que lui consacre Mme Judith Gautier :

    « Elle habitait rue Frochot un appartement au 1er ou au 2e étage, je ne sais plus trop. L’escalier n’était pas grand et il n’y avait qu’une porte par étage, ni à droite ni à gauche, mais au milieu du palier. La porte avait deux battants couleur de palissandre.

    … La salle à manger s’ouvrait juste en face de la porte d’entrée et ce lieu célèbre n’était ni très vaste ni très somptueux. La pièce, tendue d’étoffe rouge sombre, montrait des tableaux et des faïences, pendus symétriquement. La table de chêne, massive, carrée, devait s’étirer jusqu’aux murailles.

    À droite de la salle à manger, trois pièces, en enfilade, se bloquaient : le boudoir, la chambre à coucher, tout au fond le cabinet de toilette. Cela, joliment capitonné, ouaté, confortable et frais.

    Au lieu de fenêtres, un vitrage qui formait toute une paroi, éclairait ces chambres, sous les feuillages des stores qui les voilaient. Cet intérieur avait l’air d’une serre…

    La Présidente arrivait du fond de l’appartement et s’annonçait par une roulade qui s’achevait en rire perlé. Trois grâces rayonnaient d’elle au premier aspect, beauté, bonté, joie.

    Elle s’appelait Aglaé et aussi Apollonie. Elle était assez grande, de belles proportions avec des attaches très fines et des mains charmantes. Ses cheveux très soyeux, d’un châtain doré, s’arrangeaient comme d’eux-mêmes en riches ondes semées de reflets. Elle avait le teint clair et rosé, les traits réguliers, avec quelque chose de mutin, et de spirituel, la bouche petite et rieuse. Son air triomphant met-