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Les Révoltées de Brescia


de l’argent, comme il arrive en pareils cas, n’était nullement sincère.

Cependant mon jeune homme s’éloigna et, absorbé par l’installation de mes troupes, je ne m’inquiétai point de sa dénonciation. Souvent on m’en a fait de semblables dont je reconnaissais bientôt la fausseté et qui n’étaient inspirées que par la cupidité ou un besoin servile de montrer du zèle au vainqueur. J’avais même tout à fait oublié le personnage et sa démarche quand le soir, en dînant avec les principaux officiers de l’armée, je sentis l’enivrement féroce qu’on éprouve en quittant les champs de bataille, cette griserie du sang où l’on oublie les fatigues de la lutte et où on sent naître, violent et terrible, le désir de l’étreinte comme si du carnage s’élevait un appel vers la vie. Mes compagnons, jeunes, ou dans la force de l’âge, subissaient, comme moi, cette ivresse. Au-dessus des verres on entendait à chaque instant se croiser les