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Page:Rebell - La Nichina, 1897.djvu/207

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Nichina fut interrompue par les éclats de voix d’Arrivabene qui se disputait avec Polissena.

— Vous refusez de me venir en aide ; nous ne pouvons donc pas nous arranger.

— Mais puisque je vous répète que ma besace est vide et que le frère ne veut plus rien me donner.

— Alors n’en parlons plus.

— Ah ! c’est un singulier animal que ce Lorenzo.

— J’aimerais mieux lui faire vingt caresses qu’à toi une seule, mon bonhomme.

— Cela ne m’étonne pas, vous avez toujours aimé les coquins. Aujourd’hui vous vous intéressez à un homme qui a tué sa maîtresse.

— Il a tué sa maîtresse ? Mais c’est une originalité, cela ; je parierais bien que toi, tu n’as jamais assassiné personne !

— Non, jusqu’ici le ciel a bien voulu m’épargner les crimes : ne cherchez pas en moi un monstre, mais plutôt un homme vertueux, d’un charme, d’un agrément extrême, et dont toutes les femmes recherchent la compagnie. Pensez que ces lèvres qui vont vous baiser ont prononcé les plus pathétiques sermons, pensez que mes paroles ont tiré des larmes aux yeux infidèles et ramené dans la bonne route des milliers d’âmes égarées… Vous n’avez pas l’air de sentir le grand honneur que je vous fais en entrant dans votre lit.

— Mon cher, une bourse ne se remplit pas avec de l’honneur.

Ils continuèrent leur conversation à voix basse, tandis que Nichina, de crainte d’un orage, nous proposait de rentrer. La lune était voilée, le ciel sombre, et de grosses gouttes de pluie commençaient de tomber. Nous nous installâmes dans une vaste salle dont tout le fond était occupé par une volière. Quand