tion de tous ces esclaves que Figeroux tient sous sa main et qui sont prêts à faire son apologie. Mais, pour moi, ce témoignage suffit. Le noir qui m’a raconté le crime n’a d’ailleurs aucun intérêt à accuser Figeroux. D’ailleurs, au moment de la mort de Mettereau, on a déjà suspecté le mulâtre ; les explications qu’il a données, l’alibi qu’il a réussi à se créer n’ont point calmé tous les soupçons. Seulement, Figeroux impose, même aux blancs.
Je savais hélas ! mieux que personne, ce qu’il y avait de vrai et de faux dans ce récit. Sans le vouloir, le docteur avait renouvelé pour moi l’horrible scène ; je me rappelais cette arrivée de Mme Lafon ; les coups à la grille du jardin, les cris lamentables, les hurlements ; puis, dans l’entrebâillement de la porte, l’apparition effrayante sous la lanterne, les cheveux sanglants, la tête sanglante et qui semble détachée du corps, et cette grande femme aux yeux élargis et sans regard, qui entre tout à coup comme un fantôme, portant ou plutôt traînant une masse informe, un paquet de jupes boueuses : sa fille, ma chère Antoinette !… râlant d’une voix éteinte, stupide : « Sauvez-là ! Sauvez-nous ! » Tandis que nous nous empressons, Zinga et moi, autour de l’enfant évanouie, la mère perdit elle-même connaissance. Ah ! Dieu m’est témoin que je les ai couchées toutes les deux dans mon lit, que je les ai soignées comme j’aurais soigné ma mère et ma fille… Mais, pour mon malheur, Zinga était près de moi, l’immonde créa-