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JOURNAL D’UNE DAME CRÉOLE

— Maîtresse, voilà ton assassin !

Antoinette frémissait d’émotion, je voyais ses lèvres remuer comme si elle eût parlé très rapidement, mais pas un mot ne me parvenait à l’oreille.

— Oui, disait Zinga, raconterai tout ce que t’as fait, tes salauderies, ton putanisme, car as beau baisser les yeux, as beau zouer les modestes, les innocentes, t’es la plus sale de toutes les saletés !

Antoinette se cachait le visage dans ses mains, puis elle recula de quelques pas, comme si elle avait l’intention de s’éloigner ; pour moi, au lieu d’arrêter Zinga, au lieu de la battre comme je l’aurais fait il n’y avait qu’un moment, je dis à Antoinette :

— Restez ici.

À Zinga :

— Parle !

Et aux deux noirs :

— Ne la touchez pas ! Qu’elle parle librement.

Alors, après avoir repris haleine, Zinga dit :

— Maîtresse, moi te l’affirme : cette fille est une traîtresse !

— Infâme calomniatrice ! s’écria Antoinette, qui leva la main pour la frapper.

— Taisez-vous ! lui dis-je, vous vous défendrez quand Zinga aura achevé ses aveux.

— Maîtresse, Antoinette veut empoisonner toi pour ensuite te voler et se sauver avec celui qu’est son joli cœur, celui qui l’a épousée avant mariage.

— Malheureuse ! m’écriai-je, éperdue de douleur, tandis qu’Antoinette se protégeait le visage des coudes