Elle pleurait toujours. Je me suis agenouillée sur son lit, courbée vers elle, et effleurant son visage dans un baiser :
— Chère petite sotte, lui ai-je dit, croyez-vous que je parlais sérieusement ? C’était une épreuve, voilà tout. Je voulais voir si vous teniez un peu à moi ou si vous désiriez quitter la maison.
— Oh ! Madame.
— Vous m’aimez donc un peu ?
— Oh oui ! Et vrai, vous ne me chasserez pas d’ici ?
— Chère mignonne, Madame Gourgueil n’a pas l’habitude de faire du mal à personne et moins encore à celles qu’elle aime.
— Je vous suis à charge, je le sens bien, allez, madame. Si je pouvais vous aider en quoi que ce soit. Je me trouve si inutile. Et puis je suis paresseuse !
— Vous n’avez pas besoin de vous inquiéter. Vous n’avez qu’à rester près de moi. Votre présence suffit à me rendre heureuse. J’ai tant aimé votre pauvre mère, ma chère mignonne. Vous me la rappelez ; puis vous me faites oublier la grande douleur de ma vie : l’enfant que Dieu n’a pas voulu me donner et que vous remplacez.
Ses larmes coulaient plus abondantes, mais à présent c’était la joie qui l’attendrissait ainsi. Avec quelles délices l’ai-je serrée dans mes bras ! J’étais aussi surprise qu’elle-même ; la tranquillité d’âme que je cherchais ne m’était pas venue, mais une passion inattendue, dominatrice, qui effaçait tous les soucis,